Avis principal par Beldaran
Pandemonium est le nouveau titre de la collection « Latitudes » de l’éditeur Ki-oon qui offre des œuvres en grand format. Cette série se distingue de deux manières : son sens de lecture occidental qui a été dessiné de cette façon à l’origine et le fait d’être entièrement en couleurs.
Le scénario se veut mystérieux et laisse entrevoir un univers divisé en trois parties. Une qui représente les cieux avec des êtres mythiques qui déchaînent la foudre sur les villes et les villages. Ces êtres supérieurs sont succinctement décrits dans le premier chapitre, le récit s’attardant plutôt sur les catastrophes et les souffrances qu’ils causent. Ensuite la deuxième partie, correspond à la terre avec ses habitants qui subissent le courroux de « ceux qui hantent le ciel ». Ces personnes sont des êtres anthropomorphes de races diverses et variées. Et enfin, le lieu vers lequel se dirige Zipher, le village dit des « sorciers » qui peut être associé à l’enfer et faire ainsi écho au titre de l’œuvre « Pandemonium » qui est la capitale imaginaire de l’enfer.
L’histoire débute avec le personnage principal, Zipher, à moitié mort qui nous fait découvrir les premiers habitants du village des sorciers, emmitouflé dans des manteaux cousus de pièces de tissus bariolés. Les manteaux tombent rapidement et nous livrent des êtres difformes. C’est Domika, une des difformes, qui va prendre en charge notre héros le temps qu’il se remette sur pied. Les autres habitant voient d’un mauvais œil ce nouvel arrivant et on comprend rapidement pourquoi. Le village se présente comme une entité très hiérarchisée, chacun à sa place et réalise une tâche qui lui est propre. La requête particulière de Zipher, la résurrection de sa bien-aimée, nous permet de prendre la mesure des mystères qui entourent ce village, même si la vérité s’avère cruelle et nous présente la détresse d’êtres vivants différents des autres. Au fil des pages on comprend que c’est une rumeur concernant les pouvoirs des habitants du village des difformes qui a conduit Zipher à leur porte et fatalement il n’est pas le seul. Certaines pages soulignent une menace qui se rapproche lentement mais sûrement. Plus le récit avance et plus les mystères abondent ce qui vient renforcer le côté angoissant, presque étouffant de cet univers. Néanmoins, le scénario est lent. L’auteur prend le temps de nous faire prendre la mesure de la tristesse qui suppure du village, nous noie sous les mystères et ne nous donne pas beaucoup de réponses pour le moment.
En ce qui concerne les personnages, le bestiaire est particulièrement varié et très travaillé pour notre plus grand plaisir. Un des premiers que nous découvrons et qui est très très flippant, évoque le chat du Cheshire. Les autres sont des associations d’animaux totalement improbables, parfois drôles, parfois très mignonnes. Ma préférence va à Brow. Leur réaction vis-à-vis de Zipher est majoritairement gouvernée par la peur ce qui engendre quelques scènes de violence. Le maire correspond à l’image que je m’en faisais bien avant qu’il n’apparaisse et dégage une certaine classe. C’est justement en se rendant à la maison de ce dernier qu’un clin d’œil au Seigneur des anneaux a été glissé. Il faut le voir mais je vous laisse le chercher…
La compréhension du personnage de Zipher est très rapide : c’est un homme brisé, au bord de la folie et c’est cette dernière qui vient heurter de plein fouet la tristesse qui enveloppe le village des difformes. Il a donc perdu sa dulcinée lorsque la foudre s’est abattue sur sa ville. Un mystère (oui encore un) semble entourer sa bien-aimée. On ne voit jamais son visage et apprend très peu de choses sur elle, hormis le fait qu’elle était la raison de vivre de Zipher. D’ailleurs, j’ai été plus touchée par le malheur des habitants que par celui de Zipher qui paraît tellement simple, si le malheur peut l’être.
Domika la villageoise qui le récupère est plus complexe. On la sent tiraillée par l’envie de quitter les murs protecteurs du village et sa dévotion envers les habitants de ce dernier. Elle apporte une touche mélancolique.
L’ambiance très particulière du récit est amplifiée par la touche picturale qui joue sur les tons ocre bruns, jaunes sur fond noir. Ces couleurs renforcent la sensation d’enfermement que dégage le village. C’est là que je pointerais un problème majeur du titre : mettre du brun foncé sur un fond noir rend parfois illisible l’action. Toutes les pages ne sont pas comme cela. Le procédé semble avoir été utilisé lorsque l’auteur a souhaité mettre en évidence la noirceur de cet univers mais ce n’est pas très sympa pour nos yeux.
L’édition est top. L’ajout des croquis préparatoires en fin de volume est vraiment sympa. Ce format correspond parfaitement à l’œuvre et nous permet d’en apprécier tous les mystères. Petit hic, la couverture, dans l’esprit « Latitudes« , ne rend pas justice au récit qu’elle abrite.
En conclusion
Pandemonium est un récit qui nous offre un univers torturé empreint de mélancolie. L’histoire avance pas à pas dans ce premier tome qui est très agréable à lire. J’espère que la suite apportera plus de réponses.
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