Girls’ Last Tour

Girls’ Last Tour

Résumé :

Yûri et Chito errent sans but dans les décombres d’un monde dévasté. Sont-elles les dernières survivantes d’une civilisation éteinte et qu’elles n’ont pas connu ?
Découvrez notre monde tel qu’il est devenu, au travers du regard aussi naïf qu’innocent des deux jeunes filles. Source : Omaké

Avis principal par Beldaran

En 2017, je tombais sous le charme des bouilles rondes de Chito et Yûri grâce à l’adaptation animée, diffusée sur Wakanim. Le coup de cœur s’est confirmé l’année dernière, grâce aux éditions Omaké manga qui nous ont proposé la publication du titre dont le sixième et dernier volume est paru le mois dernier. La série, signée Tsukumizu, a été publiée entre 2014 et 2018 par les éditions Shinchôsha et a raflé des prix prestigieux au Japon comme le Kono Manga wa sugoi en 2015 ou encore le prix Seiun qui récompense les œuvres de science-fiction, en 2019. Elle n’a pas volé ses succès. C’est une œuvre unique et brillante qui s’apprécie sans être forcément fan de science-fiction.

En six volumes, Tsukumizu retrace le périple de Chito et Yûri qui errent dans un monde en ruine, passant d’une strate à l’autre, d’une mégalopole à une autre. L’humanité est bord de l’extinction. On devine qu’à force de guerres incessantes les humains se sont joyeusement entre tués. Pour témoigner de leur passage, il ne reste que les squelettes métalliques de diverses structures et autres machines qui arrivent au bout de leurs actions. La vie telle que nous la connaissons a disparu. Au fil des pages, l’auteur distille de menues informations qui nous guident dans la compréhension de ce futur apocalyptique mais le propos principal du récit n’est pas là. En effet, sur les traces de leur autochenille ou Kettenkrad, le binôme nous offre une vision large du passé de l’humanité (qui est notre présent) au cœur d’une ambiance étrangement silencieuse. L’atmosphère est particulièrement bien rendue et renforce l’aspect contemplatif du titre. Ne vous attendez pas à de grandes phases d’action, même s’il y aura quelques explosions parce que Yû aime faire exploser des trucs, ça la rend joyeuse. C’est beau les plaisirs simples.

L’ambiance est assez mélancolique et semble animée uniquement par le clac-clac-clac de l’autochenille et les échanges brefs mais toujours pertinents et savoureux du duo.

Ces dialogues sont une des forces de l’histoire qui s’articule autour de chapitres plutôt courts dévoilant à chaque fois une thématique particulière. Les réflexions des deux jeunes filles prêtent à sourire souvent mais sonnent toujours justes. Elles portent un regard curieux et questionnent avec justesse nos pratiques contemporaines. Le récit prend donc un aspect philosophique lorsque les filles s’interrogent sur l’art, la religion, la mort ou le rôle d’une bibliothèque. Finalement, leur périple est à l’image de la condition humaine, de cette quête insatiable d’aller toujours plus loin dans la compréhension des choses et d’atteindre ce qui nous dépasse. Pour contrebalancer cela, il y a la capacité à apprécier les petits riens et les joies éphémères de l’existence.

La construction du dernier volume est brillante et la couverture est un bon indicateur si on la compare aux autres. Chito et Yû poursuivent leur voyage qui arrive à son terme donc le ton change et de nombreuses émotions parcourent nos héroïnes mais aussi le lecteur. La fin que nous propose Tsukumizu est à la hauteur du récit qu’il a développé sur six tomes. Chacun y trouvera son compte et les perceptions seront différentes d’un lecteur à un autre mais je l’ai trouvé très réussi, tout en subtilité. C’est dans un silence assourdissant que se clôt l’histoire. C’est une série que je relirai avec plaisir.

Le récit est porté par un binôme qui se complète parfaitement, Chito qui utilise peut-être un peu trop sa cervelle et légèrement froussarde, est accompagné de Yûri (Yû) qui se laisse clairement portée par les événements comme un poisson et qui ne s’encombre pas la mémoire. C’est une joyeuse complicité qui les anime et qui se renforce au fil des pages. Si Chito est la scientifique du groupe, elle apporte les quelques connaissances qu’elle possède pour éclairer certains aliments ou monuments, c’est Yû avec son regard direct sur les choses qui déclenche les remarques les plus percutantes. Elle est souvent très drôle. Les deux personnages sont particulièrement attachants.

Les graphismes peuvent surprendre par leur fausse simplicité. Les protagonistes sont représentés de manière simple avec de belles bouilles rondes. Leur expressivité est très simplifiée mais cela fonctionne bien. Les décors sont faits d’enchevêtrements de tuyaux, de structures métalliques et parfois d’éléments plus simples. L’ensemble forme des strates complexes où notre duo peine à se frayer un chemin. On prend plaisir à se perdre dans ce paysage apocalyptique jonché d’armes et d’autres éléments métalliques. Il y a de de très belles pleines pages.

L’édition est correcte. La traduction, signée Florent Gorges, est vraiment bonne.

  • Scénario
  • Dessin
5

En conclusion

Girls’ Last Tour est un voyage unique, d’une rare intelligence et porté par un duo attachant. C’est un coup de cœur.

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