Avis principal par Beldaran
Je découvre le travail de Masasumi Kakizaki grâce à cette série et j’ai été totalement séduite par les graphismes, même si le déroulement du premier tome m’a laissé perplexe. Impression confirmée par les mots de l’auteur en fin de volume qui indique que ce titre a débuté sur un coup de tête et ne devait se composer seulement de quelques chapitres. Cela ne m’a pas empêché de dévorer les trois premiers tomes et de repartir avec le superbe shikishi proposé par Kazé à la Japan Expo.
Bestiarius, avec son premier volume, nous plonge dans une Rome Antique saupoudrée de fantastique. Le contexte historique est rapidement présenté : la puissance de Rome s’étend sur de multiples territoires et a écrasé de nombreux peuples. De la ville même de Rome, nous sont offertes que les arènes poussiéreuses où s’affrontent les esclaves guerriers de tout poil et de tout pays. Ainsi, le récit met l’accent sur une partie de l’histoire de Rome, les jeux. Même si le contexte politique n’est pas très développé, on comprend l’importance des jeux dans la vie de Rome et surtout qu’ils sont capitaux pour asseoir le pouvoir de l’empereur en place, Domitien. Il est intéressant de constater que plus on arrive à divertir le peuple romain et l’empereur et plus on gagne en pouvoir mais c’est une arme à double tranchant. A côté de cet aspect relativement réaliste, s’ajoute l’aspect fantastique avec toute une galerie de monstres et autres bestioles mythologiques. On sent que l’auteur s’est fait plaisir. Cependant, curieusement, cela ne dérange pas la narration. J’ai trouvé qu’ils s’inséraient parfaitement dans l’histoire, lui apportant un petit plus.
Le premier tome est découpé en deux histoires, histoires reliées par un fil conducteur quelque peu bricolé, surtout que la première se déroule après la seconde… Nous découvrons d’abord, la vie dans l’arène, de Finn et de la wyverne Durandal. Le déroulement n’est pas d’une grande originalité, on sent les faits venir de loin mais cela reste agréable à suivre et cela présente des thématiques que l’on va retrouver par la suite, comme la volonté de retrouver sa liberté et son honneur.
Le second récit, nous dévoile les péripéties de Zénon et de son frère, d’un genre particulier. Ici l’auteur réinvente le mythe du minotaure et c’est bien fichu.
Il ne faut pas s’arrêter à l’aspect décousu du tome 1 car les deux suivants offrent un arc plus long, plus travaillé (même si l’évolution physique de certains personnages a de quoi choquer) où l’on retrouve avec plaisir des personnages. Vu le scénario, on peut se demander si chaque arc, se déroulera sous le schéma du combat d’un homme contre l’Empire ou si l’histoire va s’étoffer, car oui, la série se poursuit avec un quatrième volume annoncé pour la fin de l’année dans notre contrée.
Si l’histoire est classique mais efficace, le tout fonctionne grâce à de superbes dessins. On en prend plein les mirettes. Le bestiaire est tout simplement fantastique avec un rendu des créatures particulièrement soigné et détaillé : incroyable, tout simplement. Mais les humais ne sont pas en reste avec des vêtements travaillés et des visages vraiment expressifs. J’ai été scotchée par le rendu des doubles pages. Les dessins donnent au récit une intensité phénoménale. Je crois que je pourrais conseiller cette série seulement pour la beauté des graphismes.
Du côté de l’édition, c’est du tout bon avec des pages couleurs, une traduction soignée avec un soin particulier apporté au rendu des dialogues (police d’écriture).
Tomes 4 et 5 par Beldaran
Après les aventures d’Arthur et de ses compagnons, c’est un nouvel arc qui s’ouvre, il s’étend jusqu’au tome 5 et il est d’une puissance incroyable.
Cette fois-ci le point de vue change et nous découvrons le récit par les yeux du centurion Lucius Dias, fervent défenseur de Rome dont la vision du rôle de sa patrie change progressivement. C’est un personnage réellement attachant qui prend conscience des atrocités commises par Rome qui sous les ordres de son empereur, Domitien, accélère l’anéantissement des peuples non-humains. Domitien ne digère pas la cuisante humiliation causée par Finn et Durandal ce qui le conduit à Britannia à la recherche du village d’Arthur. Il est plaisant de constater que l’auteur n’oublie pas ses premiers personnages et c’est un plaisir de retrouver Arthur qui s’offre un grand moment épique et terriblement tragique mais qui ouvre les yeux de Lucius Dias.
Le centurion est finalement accusé de trahison et contraint de faire couler le sang dans l’arène afin de protéger sa famille. Ce chantage le ronge, ce qui est parfaitement illustré par une scène de grande intensité qui marque le début de la révolte.
L’auteur en profite pour étoffer sa galerie de personnages, de non-humains notamment et revisite de manière totalement inattendue, une figure charismatique de l’histoire, Hannibal. Je ne m’attendais pas à cela mais c’est bien fait et le personnage est touchant.
Du côté de Rome, le tribun Solonius intrigue et s’est particulièrement rapproché de Domitien. L’empereur est influençable et sa faiblesse transpire dans chacune de ces actions.
Le déroulement de l’histoire est classique avec des événements prévisibles et pourtant, la narration nous happe. Elle est très bien rythmée et parsemée de multiples rebondissements avec un souffle épique qui gonfle plus on tourne les pages.
L’ambiance est incroyable. Elle est portée par de superbes graphismes. Les doubles pages sont exceptionnelles, intenses et formidablement marquantes. La force de la série réside dans la beauté des dessins qui transcendent le récit.
Cet arc a placé les pions pour lancer l’intrigue finale. Rome décline avec un pleutre pour empereur et les intrigues du sénat. La dernière page remet sur le devant de la scène le duo du premier tome, Finn et Durandal qui aura fait office de fil conducteur tout au long de l’histoire. La boucle est bouclée et le final promet d’être épique.
Tome 6 par Beldaran
Il est là, l’avant dernier tome. Il fut aussi dense et captivant que les précédents.
Finn et Durandal sont sortis de leur retraite, l’heure de la révolte est venue. Ils brûlent les garnisons romaines avec une efficacité redoutable. Rome vacille. L’empereur n’est plus que l’ombre de lui-même, les romains grondent et le sénat envisage de destituer Domitien. Cependant, une personne n’a pas l’intention de perdre son statut, si chèrement acquis, l’impératrice Domitia. Cette femme est redoutable. Elle prend les choses en mains et libère un être qui pourrait causer la chute de Rome.
Deux nouveaux êtres de taille font leur apparition Saeros, un demi-elfe et la dernière chimère, le redoutable Longinus. Nous avons là un duo à la hauteur de Finn et Durandal.
L’auteur prend le temps de présenter Saeros, personnage dévoré par la haine qui possède un objectif précis. Sa façon de penser se heurte de plein fouet à la vision plus pacifique de Finn. Leur affrontement est inévitable. Il est dantesque, tragique et les rebondissements multiples au cœur des flammes au son des glaives qui s’entrechoquent. C’est un des combats les plus incroyables du titre. Cependant, ce combat qui aurait pu marquer la fin de l’histoire propose un déroulement inattendu. Saeros semble réfléchir à ce qu’il a entendu, découvert sur le peuple libre ce qui vient étoffer le personnage.
Finalement, c’est la réaction de Finn qui nous prend le plus au dépourvue, tellement elle peut paraître aux antipodes de tout ce qu’il a démontré au fil des pages. Les dernières cases sont profondément poignantes, avec une double page d’une puissance folle qui marque la fin d’un point important du titre.
Les dessins demeurent incroyablement saisissants et percutants. La chimère présente un superbe design et dégage une folle puissance, à l’image de Saeros tout en haine, force et folie destructrice.
La série trouvera sa conclusion au prochain volume. L’échiquier est en place et le final devrait être grandiose, captivant et dense, à l’image de ce que l’auteur nous a proposé jusqu’à présent. L’attente s’annonce longue.
Chronique réalisée grâce au service de presse des éditions Kazé.
En conclusion
Bestiarius propose en trois tomes une immersion dans un univers riche au côté de personnages charismatiques. Le côté classique du récit est transcendé par la beauté des dessins. Une réussite.
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